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Niak : Carl Hiaasen croque les requins de la télé !

Embarquez pour une folle équipée au coeur de la Floride ! Rejoignez le jeune Wahoo, son amie Anguille, son père Mickey et le célébrissime Derek Blair pour un tournage rocambolesque dans le parc naturel des Everglades. Accrochez-vous à votre hydroglisseur, empoignez votre crème antimoustiques, vous voilà prêts à slalomer entre les alligators !
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Le résumé :

Dans la famille Cray, je demande le père : Mickey, un dresseur d’animaux sauvages un peu déphasé depuis qu’il a été assommé par un iguane congelé. Wahoo, le fils dont le prénom est aussi le nom d’une espèce de poisson. Et Alice, le crocodile docile à la mâchoire qui ne manque toutefois pas d’efficacité. Mais la petite famille ne serait pas au complet, si on ne vous parlait pas de toute la ménagerie qui vit à leur côté : reptiles, sauriens en tout genre, singes et compagnie … Ajoutez pour subvenir au besoin de tout ce petit monde, la mère contrainte de s’envoler pour la Chine histoire de remplir le frigo familial et de payer les factures de temps à autre ! Voici un sacré tableau avec pour toile de fond la Floride et ses Everglades, cadre luxuriant de Niak, le roman de Carl Hiaasen. 

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Déjà bien étrange, l’atypique univers des Cray se voit encore chamboulé quand une société de production d’émission de télé-réalité à la recherche d’un dresseur d’animaux exotiques fait appel à Mickey. Père, fils et une partie de la ménagerie se retrouvent donc embarqués au côté du célèbre aventurier survivaliste : Derek Blair, star de l’émission Expédition Survie. Mais l’aventure, le courage, l’instinct de survie ne sont en réalité qu’une façade pour écrans télé ! Derek Blair est un pseudo-survivaliste déjà presque has-been, capricieux, bedonnant, abonné aux hôtels de luxe et aux vols en hélico. Les animaux affrontés lors de chaque épisode à grand renfort d’effets dramatiques et sous l’angle très bien orienté des caméras ne sont que de dociles bébêtes déjà familières des plateaux télé …

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Oui, mais voilà, le tournage d’Expédition Survie se fera cette fois-ci dans les Everglades pour le plus grand plaisir de Derek Blair qui se voit déjà entreprendre un rodéo à dos de croco sous l’oeil des caméras et des producteurs avides de sensations fortes. Entre Mickey, chargé d’assurer sa sécurité et Derek nigaud impulsif, cela fait donc rapidement des étincelles ! L’ un surveillant les caprices de l’autre comme le lait sur le feu. Duo lui-même sous la bonne garde de Wahoo, jeune garçon mâture qui traite avec l’équipe de tournage, gère l’entreprise familiale, anticipe souvent les pépins et veille au grain … Et évidemment à trop tendre l’élastique la catastrophe finit par arriver ! 

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Mon avis :

La première partie du roman s’attache à dévoiler les coulisses d’une émission de télé-réalité. Carl Hiaasen nous présente sans concession l’envers du décor, la vérité cachée sous les belles images et les vues aériennes en hélicoptère d’émissions types Man vs Wild ou autres Koh-Lanta. Épisode scénarisé, plans coupés, cascades, doublage, équipes de tournage et de production, responsable des relations publiques … l’auteur convoque tous les ingrédients de l’univers télévisuel et en fait une critique drôle et acerbe que j’ai beaucoup appréciée. Seulement voilà, à mon sens l’histoire piétine et on s’embourbe un peu dans les marais …  Le récit ne décolle véritablement qu’aux alentours de la page 170 (sur 295 tout de même) quand Derek Blair prend la poudre d’escampette, que Wahoo et son amie Anguille se retrouvent enrôlés dans la course à l’aventurier faisant ainsi (enfin) face aux ennuis et aux dangers. La quatrième de couverture qui nous vendait une chasse au survivaliste palpitante avait donc juste omis de nous préciser qu’il fallait un peu patienter …

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Le récit manque donc pour moi un peu de punch et de mordant. Il s’en est fallu de peu pour que Niak ne me tombe des mains. J’ai trouvé cette première partie trop plate à mon goût, un peu longue et j’ai bien peur que des élèves ne fassent pas l’effort de s’accrocher … Dommage, car la deuxième partie qui met en scène la fuite de Derek Blair puis sa chasse à l’homme à travers les Everglades est elle rythmée, chaotique à souhait et mouvementée.

Mais, si l’action tarde à venir, l’auteur n’en réussit pas moins à croquer cet environnement si particulier que sont les Everglades. Ce cadre peu connu est agréablement mis en valeur, notamment grâce au personnage d’Anguille. L’amie de Wahoo, fan de Derek Blair est une experte de la faune et de la flore. Pour s’évader du camping-car et du parking de supermarché sur lequel elle vit avec son alcoolique de père, la jeune Anguille dévore les ouvrages et mémorise les noms latins. Cet atypique, mais non moins sympathique personnage permet au lecteur d’accéder l’air de rien à une foule de connaissances sur cet écosystème incroyable que sont les Everglades. Vous l’aurez compris dans Niak non seulement on ne fait qu’une bouchée des dérives de la télé-réalité, mais en plus on ingurgite en douceur des connaissances sur ce milieu si particulier. Le décor, la nature sauvage et fascinante des Everglades sont définitivement ce que j’ai préféré dans ce roman. 

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Le voyage et le dépaysement sont donc garantis dans un récit qui ne manque pas de mordant, et ce dans tous les sens du terme. Carl Hiaasen croque en effet des personnages hauts en couleur qu’il plonge dans un environnement dense et consistant. Ces héros qui seront vos compagnons de route pendant cette envolée sauvage, voilà l’autre point fort du roman. La famille Cray est sympathique et attachante, même Alice le crocodile vous arrachera un sourire. Le personnage du père, Mickey Cray, un dresseur de reptiles bougon, mais relax et d’un sang-froid à toute épreuve n’est pas sans rappeler le fameux Michael J. « Crocodile » Dundee. J’ai aussi trouvé que la relation qui l’unit à son fils Wahoo était intéressante. Les rôles sont en effet volontairement inversés dans cet étrange duo père-fils, face à un père à la tête dure et à la caboche sensible, le jeune adolescent endosse le rôle de chef de famille, se révèle habile négociateur avec les producteurs et tisse une belle amitié avec Anguille. 

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Enfin, la palme du meilleur personnage revient assurément à Derek Blair pour son rôle de survivaliste de pacotille, prétentieux, lâche et misanthrope ! Derek Blair est un blaireau fini qu’on adore détester. Suivre ses colères et ses coups de tête dont on sait qu’ils le mèneront obligatoirement à la catastrophe est un vrai plaisir ! Et n’ayons pas honte de dire que lecteur se délecte lorsque le drame  se produit enfin. 

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En résumé, Niak n’est pas un roman sans saveur, mais le plat de résistance pourtant vanté par la quatrième de couverture tarde à venir. Niak est assurément un roman d’aventures, plein d’actions et de rebondissements, mais la mise en bouche s’éternise et il faut s’avoir patienter jusqu’à mi-roman pour voir l’intrigue décoller. Ainsi, malgré un titre accrocheur et évocateur ne vous attendez pas d’entrée à une explosion d’actions. Une étude ou une lecture intégrale avec des élèves me semble dès lors un peu fastidieuse, mais en tranche ou à la carte, nul doute que vous saurez trouver dans Niak de très bons passages croquant à pleines dents les travers de la télé-réalité souvent si appréciée de nos élèves. 

Cet article vous met en appétit ou vous avez peut-être d’autres idées de titres sur cette même thématique ? C’est à vous, dites-nous tout ! Céline.

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